Le mur du cimetière

Publié le par R.D.

 

Les Archives Départementales des Landes conservent une lettre du maire de Lahosse (Etienne Julien Daverat)  au sous-préfet (Saint-Sever). (E dépôt 141 2 M 3). Nous sommes en 1861. Le maire souhaite « rendre compte de son voyage à Mont-de-Marsan au sujet de l’affaire du cimetière et de l’église ». Le texte de la lettre mériterait d’être transcrit tant le ton est désabusé presque désespéré. Résumons. En quelques mots, le maire s’est rendu au chef-lieu dans le but d’obtenir une subvention pour financer des réparations à l’église et reconstruire partiellement le mur du cimetière.

Voici en quels termes la situation est décrite dans une délibération le 17 août 1862 :

Les murs de clôture et le cimetière lui-même sont dans un état déplorable et particulièrement le mur qui se trouve au nord et au sud et doivent être reconstruits à neuf. Ils sont en grande partie déjà écroulés et il en arrivera bientôt des autres comme ceci si on ne se met pas bientôt la main à l’œuvre pour les réparer.

Or si la commune y affecte la totalité des fonds disponibles, aidée par la fabrique, il manque néanmoins une centaine de francs  pour financer les travaux. Urgents et indispensables car le cimetière n’est pas clôturé, les murs de l’église sont lézardés, le clocher menace de s’écrouler. Le maire n’a aucun recours : il a déjà fait voter une imposition extraordinaire. Il est hors de question qu’il renouvelle l’expérience car les plus gros contribuables sont les « propriétaires forains » (entendez ceux qui ne résident pas dans le village). Ils rechignent comme il se doit à lâcher les cordons de leur bourse.

Ce qu’il n’a pas obtenu du préfet – et qui conditionne la subvention – c’est surtout l’autorisation d’agrandir le cimetière. En effet, de nouvelles dispositions encouragent les communes à déplacer le cimetière lorsque ce dernier entoure l’église et à le placer loin de toute habitation. Ce qui explique pourquoi certains cimetières sont perdus au milieu des champs de Maylis (Caupenne, Gaujacq, Saint-Aubin). La commune se conformerait volontiers à cette obligation mais où trouver un terrain ?  Le maire argue que seule une maison se trouve à proximité, que le nouvel acquéreur y vivait déjà et s’en accommodait, et que l’ancien avait consenti à vendre du terrain pour l’agrandissement preuve qu’il ne s’y opposait pas…

Cette supplique au  sous préfet fut suivie d’effet : le 10 novembre 1862 la commune se voit accorder un « secours de 100 francs sur le produit des amendes de police correctionnelle ».

Le dossier était prêt. Béguery, maçon à Lahosse avait rédigé le cahier des charges et établi un devis.

Cahier des charges.

Il prévoit de reconstruire à neuf 72 mètres de mur et de réparer et crépir des deux côtés 58 mètres de vieux murs. Ces murs auront une hauteur de 1,33 m au niveau du sol extérieur et 1,65 avec la fondation qui aura 0,45 m d’épaisseur. Le mortier sera composé de deux parties de sable lavé et d’une partie de chaux. Il ne pourra être employé que de la pierre dure des carrières de Lahosse et Larbey et celle provenant de la démolition des vieux murs.

Le portail au couchant sera reconstruit sur le mode actuel avec les mêmes matériaux. La pierre douce ne sera employée qu’au-dessus d’un mètre. Les pieds-droits seront en pierre dure jusqu’à 1 mètre de hauteur.

Les murs devront être crépis sur toutes faces et arrondis à leur sommet et ceux construits à neuf seront raccordés avec ceux du petit portail déjà placé du côté nord et leurs angles et courbes seront régularisés autant que la configuration du cimetière le permettra.

Devis (10 août 1962).

Pour les murs à reconstruire (nord et levant)

- 73 m3 de moellons (la moitié proviendront de la démolition) le transport sera effectué par prestation volontaire                                                                                                       76,60 fr

30 m3 de sable                                                                                                           90 fr

54 hectolitres de chaux                                                                                  135 fr

40 journées de maçon                                                                                                70 fr

100 journées de brasse pour démolition                                                                      125 fr

 

Pour les murs à réparer (58 m) soit 155 m2 :

27 journées de maçon et 7 journées de brasse

Pour un total de 569 francs.

Lors de la réception des travaux le 25 avril 1863 il s’avère que la réparation  a été effectuée  par  Crabos, maître  maçon à Montfort. Notez que l’adjudication a eu lieu le 15 mars 1863. Crabos était seul adjudicataire.

Un autre document en date du 30 mai 1937 prévoit de construire un mur en « aggloméré de ciment » et un portail en fer forgé. Estimation des travaux : 1 000 francs. Ce mur est probablement celui qui a été laissé tel quel. Preuve qu’il est préférable de reconstruire à neuf. Les murs reconstruits en 1863 tiennent toujours. Chacun peut vérifier le travail des maçons, la qualité des pierres, la profondeur des fondations, puisque la municipalité a organisé une « ayudère », une matinée où les volontaires ont procédé au décrépissage des murs et  au déblaiement des gravats. Il ne reste au maçon qu’à entrer en scène.

Documents :

 

 

Sur cette photographie apparaît le portail décrit dans le devis. Un plan se trouve dans les documents. La photo est antérieure à son remplacement par un portail en fer forgé en 1937.

 

 

Ce plan (AD Landes E dépôt 141 2 m 3)montre comment le cimetière a été agrandi en déplaçant le ruisseau.  

Voici la légende qui l’accompagne :

327 : église

328 : cimetière

329 : terre en nature de levée

Bande rouge : limite projetée

Bande jaune : mur actuel

 

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