(Saint)-Jean-de-Bosc.
Il est un lieu dont me parlaient souvent les Lahossais qui le connaissent et qu'ils appellent Saint-Jean- de-Bosc ou Jean-de-Bosc. Il y avait là, autrefois, une chapelle et un cimetière, m'assure-t-on.
Même si, précisons-le d’emblée, ce lieu ne se trouve pas exactement à Lahosse mais sur le territoire de Caupenne, il ne m’en fallait pas plus pour m'inciter à chercher à en savoir davantage. Commençons par le localiser.
Lorsque vous quittez Lahosse en direction de la D 158, tournez à gauche à l’intersection, puis à droite vers Caupenne. Sur votre gauche, vous longez d’abord un bois (ou ce qui en reste) et à quatre cent mètres environ vous trouvez un champ (toujours sur votre gauche).
En longeant ce champ (sur sa gauche) vous accédez à une parcelle boisée de grands chênes, du moins ceux qui restent après les dernières tempêtes . A l’entrée de ce bois se trouve une « parguie » (comprenez une grange), relativement récente et toujours utilisée.
Cette petite partie du territoire (environ
Premier mystère : ce toponyme n’est porté sur aucune des cartes que j’ai pu consulter, pas plus que sur les plans napoléoniens de Caupenne. Sur ces plans, très curieusement, cette section du plan est dénommée : Section A dite de Jeune Bois.
On sait que les géomètres qui ont établi les plans n’étaient pas autochtones, que les noms de lieux leur étaient donnés en « patois » et que ces derniers les orthographiaient comme ils l’entendaient. Pour établir l’étymologie d’un nom de lieu les spécialistes tiennent compte de la prononciation locale du mot pour retrouver le nom originel.
Ainsi, à Lahosse, on trouve un ruisseau dénommé de la Bâche dou berns dans une zone proche du Louts. A Maylis le chemin de randonnée emprunte un chemin de la Bâche.
Ceci étant dit on se demande quel nom les autochtones ont fourni au géomètre pour cette zone. Peu peuplée, constituée de marécages et de landes. Sur la carte de Cassini cette partie du territoire est dénommée : Genevois.
Et sur un autre document, une carte établie par l'instituteur en 1887 (document qui m'a été communiqué par Philippe Dubedout, à qui j'ai confié la solution de l'énigme) cette partie du village est dénommée par lui Jeanne Bois ! Il ne donne pas l'équivalent en gascon, comme c'est le cas pour les autres toponymes.
Pour Philippe Dubedout il s'agit très vraisemblablement de la transcription -avec des mots bien français - du nom Joan Bòsc prononcé par les locaux, incapables d'épeler.
Reste un document de 1664, (dénombrement des biens des barons de Caupenne que Jacques de Cauna a bien voulu me transcrire) le ruisseau est appelé ruisseau de Jean Duboscq.
Le territoire décrit dans le document comprend le moulin, une terre d’une superficie de 40-
Ceci atteste indiscutablement l’existence du toponyme au XVIIe siècle.
Le Cartulaire de la Cathédrale de Dax (acte 174) inclut une église Saint-Jean-de-Boscq (Sanctus Johannes de Lanelug) dans la liste des églises du diocèse. Le document place cette église entre Saint Martin de Goueytes (Caupenne) et Saint Laurent de Gouarrigues (église Saint Laurent à Caupenne). En note, les éditeurs placent cette paroisse à Maylis.
Les paroisses sont listées en suivant un ordre qu’il faudrait étudier pour vérifier s’il tient compte des chemins ou d'un regroupement de paroisses. par exemple. Rien pour l’instant ne permet de situer là cette église (et aussi paroisse). Le quartier qui nous intéresse ne se trouve par sur une droite reliant les deux églises citées.
Ce lieu se trouve sur le chemin de Saint Jacques (de Larbey à Baigts). Ce qui pourrait justifier la présence d’un hospice, dans une zone inhospitalière, fondé par les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Indiscutablement une église a bien existé dans une zone boisée au Xe ou XIe siècle (date du cartulaire).
Des indices supplémentaires viennent (localement) accréditer la tradition qui y place une construction. Je vous les livre - tels quels. Les spécialistes seront sceptiques mais ils font partie de l’histoire locale que je souhaite pérenniser.
Le champ est un défrichement récent. Si vous regardez la carte IGN la topographie du lieu montre une légère éminence de forme circulaire au fond du champ, à cheval sur la partie cultivée et le bois. (Au fond à droite sur la photo).C’est là qu’en labourant l’agriculteur qui exploitait les terres disait avoir heurté une grosse pierre, "comme un mur", avec le soc de la charrue. Ceci dans les années cinquante.
C’est là également qu’on a trouvé des fragments de poteries «comme noircies par le feu » ainsi que des ossements humains.
Pour ce qui est des ossements je n’ai que la parole de l’exploitant actuel mais les poteries ont bel et bien existé. Notre voisin les montrait – et l’épouse de l’agriculteur décédé les a vues. « Il y avait des fragments » dit-elle « mais aussi un vase entier ».
J'ai donc cherché à savoir si ces éléments avaient été authentifiés et par qui, car l’agriculteur affirme qu'"ils étaient venus voir".
J'ai interrogé le SRA qui a fait des recherches mais n'a aucune trace. Mais cet organisme, si j'ai bien compris, n'existait pas encore dans les années 70.
Lorsque le champ vient d’être labouré, me dit l’exploitant actuel, la couleur de la terre à cet endroit est un peu différente. Dans le bois on remarque un emplacement où la végétation est différente. L’herbe y pousse plus tôt au printemps.
Lorsque nous avons vu les lieux le 19 mars 2012 rien n’était visible mais la végétation n’avait pas encore « démarré ».
A l’heure actuelle, en cherchant bien, à l'époque des labours, on peut y voir des pierres et ramasser quelques petits morceaux de tuiles ou de poteries (?). Je les tiens à la disposition de quiconque voudrait les authentifier.
Et sans ce texte Saint-Jean-de-Bosc aurait définitivement disparu.
Je ne saurais terminer sans rapporter ne anecdote que Michel m'a racontée à plusieurs reprises. Ecoutez-le :
"C'était durant pendant l'occupation. Le printemps était pluvieux, la terre était détrempée. Je gardais les vaches à Saint-Jean-de-Bosc. Pour m'abriter un peu de la pluie je m'étais réfugié momentanément dans la parguie en attendant l'heure de rentrer déjeuner.
Soudain j'entendis des pas et des voix : une patrouille allemande ! Les allemands avaient réquisitionné l'un des cafés de Caupenne où ils logeaient.
La porte de l'abri fut poussée et je vis entrer deux soldats portant un sac de jute. Ce sac, je m'en rendis compte plus tard, contenait un dindon vivant. L'avaient-ils volé, l'avaient-ils acheté, je ne leur ai pas posé la question.
Tout comme moi, ils étaient trempés. Ils se dirigèrent vers le fond de la grange, posèrent leur sac et entreprirent d'allumer du feu. Ils trouvèrent sans peine une serpette dans la mangeoire, et cherchant du combustible, s'emparèrent des éléments du jeu des quilles de six que nous les enfants avions confectionné pour passer les longues heures. Il ne leur fallut pas beaucoup de temps pour les transformer en bûchettes. J'avais peur car le grenier était rempli de foin. Sans pudeur aucune les voilà qui se déshabillent, gardant seulement leur slip, pour mettre leurs vêtements à sécher. Le séchage vous l'imaginez prit du temps. Moi j'étais transi de peur dans mon coin et surtout j'avais faim ! On m'attendait à la maison ! D'autre part je ne pouvais pas quitter les lieux sans fermer la grange où nous remisions la faucheuse, entre autres. Au bout de quelques heures je me hasardai à bouger mais l'un des hommes m'apostropha en mauvais français : "Toi, pas partir". Il me fallut donc patienter jusqu'à ce que mes hôtes se décident à revêtir leur uniforme (pas vraiment sec) et à quitter les lieux".